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Le crowdfunding immobilier existe depuis longtemps

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Le crowdfunding immobilier est la locomotive de l’industrie du crowdfunding tant en termes de rentabilité qu’en volume d’argent levé. Pourquoi ? Ces très bons rendements ne sont pas dénués de risques, comment réduire le risque lié au crowdfunding immobilier ?

Le crowdfunding existe depuis longtemps. En effet, à la fin du 19ème siècle en France dans la presse qui était tirée à des millions d’exemplaires, il existait des pages de demande de souscriptions où la population pouvait financer par le don (mais pas seulement, des prêts et des prises de participations en capital étaient également possibles) de très nombreux projets. Ce type de financements est tombé en désuétude dans les années 30, avec le début du déclin de la presse et la réglementation de plus en plus stricte de l’appel public à l’épargne et de la fiscalisation de la philanthropie et des dons.

Ce rappel historique est important, car à l’aube des années 2000, avec l’essor d’Internet et le début de la « plateformisation » de l’économie sont apparus, au départ dans les pays anglo-saxons et ensuite assez rapidement en France, des plateformes web de financement participatif qui permettaient de faire appel à un grand nombre de personnes (crowd, la foule) pour financer des projets. Ce financement pouvait s’effectuer en dons, en prêt (crédit ou obligation) ou en prise de participation en capital. C’est donc la diminution des coûts induits par la digitalisation via les plateformes web qui ont permis au 21ème siècle la résurrection du financement participatif de projets « par la foule ». Le déploiement du crowdfunding en France décolle en 2008, juste après la crise qui voit les épargnants se méfier des banques et prendre confiance en leur propre capacité à choisir par eux-mêmes les projets où investir. Le secteur se structure et en 2014, la France est le premier pays au sein de l’Union Européenne (hors Royaume-Uni) à disposer d’une réglementation du crowdfunding qui inspirera la réglementation européenne.

Ainsi en 2022, le crowdfunding en France, c’est près de 2,4 milliards d’euros de collectés pour financer des projets : 2,1 milliards (89% du total) en prêt ou en obligations, 150 millions en actions (6% du total) et 100 millions en dons et ce, malgré les turbulences macro-économiques, géopolitiques, sanitaires, etc. Ces chiffres démontrent la résilience du crowdfunding qui s’installe comme une solution d’épargne pour les Français de plus en plus usuelle. Depuis 2015, les chiffres ont été multipliés par 14 pour atteindre les 7 milliards de financement cumulés en France, tous modèles transactionnels confondus (don, prêt, investissement).

Dans ce paysage florissant et en croissance, le crowdfunding immobilier se taille la part du lion que ce soit en poids ou en croissance. Il a représenté en 2022, près de 1,7 milliards d’euros sur le total de 2,4 milliards, soit plus de 2/3 de la totalité de collecte. L’immobilier est donc et de loin la part la plus importante du crowdfunding et ce poids s’intensifie ! En effet, alors que la croissance du crowdfunding a été de 25% entre 2021 et 2022, le crowdfunding immobilier a vu son volume de collecte progresser de 40,2% entre 2021 et 2022, soit 1,6 fois plus vite que la totalité du marché. Mais qu’est-ce qui explique un tel succès ?

La réponse est simple, le crowdfunding immobilier est dans le choix d’allocation d’actifs de l’investisseur en crowdfunding, le produit financier où le couple rendement/risque est le plus attractif et depuis plusieurs années déjà. En effet, sur les années 2019 à 2022, le rendement moyen observé pour un projet de crowdfunding immobilier était de 9,2% annuel pour une durée moyenne de placement d’un peu moins de deux ans (21,4 mois). C’est un rendement très attractif quand on se souvient que l’actif sans risque des bons du trésor d’état avait un rendement réel très faible (2015-2019), voire négatif sur la période 2020-2021 (taux d’intérêt très bas et inférieur au taux d’inflation qui commençait à remonter).

 

Mais pourquoi les projets immobiliers n’ont-ils pas ralenti malgré les taux très élevés de rendement demandés aux entrepreneurs ? Répondre à cette question va nous permettre d’expliquer les mécanismes de fonctionnement du crowdfunding immobilier.

Tout d’abord, il faut dissiper un malentendu très fréquent quand on parle de crowdfunding immobilier, il ne s’agit pas d’acheter un bien immobilier à plusieurs, mais d’aider un promoteur immobilier ou un marchand de bien, donc un professionnel de l’immobilier, à mettre en œuvre un projet immobilier. En effet pour mettre en œuvre un projet immobilier, un professionnel doit se voir accorder un crédit par une institution financière. Pour ce faire il a besoin de fonds propres ou de quasi-fonds propres. Plus ces fonds propres sont importants, plus il pourra obtenir un prêt important à un taux d’autant plus bas qu’il a beaucoup de fonds propres. Ainsi l’investisseur peut faire jouer à fond l’effet de levier.  C’est pourquoi le porteur de projet va être prêt à offrir un rendement important à l’investisseur en crowdfunding immobilier, car cet investissement va lui permettre d’accéder au crédit bancaire qui lui permettra de financer son projet. L’épargnant va donc pouvoir soit entrer au capital du promoteur (2,3% du volume investi), soit prêter sous forme obligataire au promoteur (97,7% du volume investi). Le crowdfunding immobilier est donc un véhicule financier proposé aux investisseurs particuliers permettant au promoteur de l’aider dans son apport en fonds propres auprès de ses banques créancières.

Mais attention, cette rentabilité très satisfaisante n’est pas dénuée de risque et le risque pris par les investisseurs en crowdfunding immobilier c’est le risque qui est pris dans l’activité de promotion ou de réhabilitation immobilière : problèmes de retard dans la livraison du programmes, coûts supplémentaires non planifiés (ce qui arrive aujourd’hui en période d’inflation), difficultés à commercialiser les programmes (ce qui arrive aujourd’hui en période de hausse des taux où de nombreux ménages n’ont plus accès aux crédits).  Ainsi comme un investissement en capital il y a risque de perte totale ou partielle de l’argent investi, c’est d’ailleurs ce qui explique la rentabilité très forte de ce type d’investissement.

Mais alors comment limiter le risque ? Tout d’abord l’investisseur particulier, surtout s’il n’a aucune connaissance de l’immobilier peut désormais être accompagné dans sa démarche. En effet, il est intéressant de noter que le crowdfunding n’est pas une industrie totalement désintermédiée : si l’approche directe depuis les plateformes reste prépondérante (aux 2/3), les canaux via les conseillers financiers (15%) et les fonds d’investissement (8%) ne sont plus anecdotiques et prennent une place croissante. L’investisseur particulier peut donc passer par ces intermédiaires qui l’aideront à choisir la meilleure opportunité.

Autre façon de mitiger le risque : s’orienter vers les projets de réhabilitation immobilière qui sont en croissance (56% des projets de crowdfunding immobilier) et qui vont de pair avec les projets de réhabilitation répondants aux dernières normes environnementales plutôt que vers les projets de promotion (35 % des projets de crowdfunding immobilier, mais dont la croissance diminue) qui ont plus de mal à obtenir les permis de construire et voient leur coût croître très fortement.  L’Epargnant peut se diriger aussi vers les quatre plateformes  les plus importantes (wiseed, anaxago, club funding, homunity) qui disposent de fonds propres suffisants pour suivre aux aléas et qui regroupent en 2022 quasiment 60% de l’ensemble de l’épargne obligataire du crowdfunding immobilier, pour des des montants totaux investis de 241 millions d’euros chacune. Cette course à la taille est importante car elle a des conséquences en terme réglementaire.

Le régulateur constatant le développement de l’industrie a en effet souhaité mieux protéger  les épargnants en obligeant les plateformes à obtenir un agrément européen appelé prestataire de services de financement participatif (PSFP). Cet agrément est difficile à obtenir, il permet d’avoir accès à des investisseurs non français et de financer des projets dans toute l’union européenne. Il est plus exigeant en matière de fonds propres et de « compliance » (processus de sélection des promoteurs et des projets). Le nouvel agrément doit être obtenu pour novembre 2023 et compte tenu des critères à respecter, ce choc réglementaire aura probablement pour conséquence une augmentation de la concentration des plateformes de crowdfunding qui sont aujourd’hui encore très atomisées : 200 plateformes agréées pour 60 réellement actives. Cette concentration permettra une meilleure gestion des risques et un couple rendement/risque mieux maîtrisé au service du rendement dans le crowdfunding immobilier.

 

Sources :
Bercy infos Entreprises – Ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique ;

Financement participatif – AMF ;
Crowdfunding Projets Immobilier – BPI France
Baromètre du crowdfunding en France 2022 – Financement Participatif France et Mazars ;
Baromètre du crowdfunding en France 2022, focus Immobilier – Financement Participatif France et Mazars ;
Crowdfunding immobilier – Boursorama Banque.

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