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De l’ISF à l’IFI : Retour sur une réforme controversée

Economie Fiscalité
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Le coup d’envoi de la traditionnelle déclaration de revenus a été donné le 8 avril. Pour certains contribuables, cette dernière va s’accompagner de la déclaration d’IFI. Promesse de campagne d’Emmanuel Macron, l’impôt sur la fortune immobilière est venu remplacer, en 2018, l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Trois ans après cette réforme, quel bilan peut-on en tirer ?

Retour sur la création de l’IFI

À l’origine, l’ISF est issu de l’Impôt sur les Grandes Fortunes (IGF), créé en 1982 par François Mitterrand. Ce dernier avait été supprimé en 1986 par le Gouvernement de Jacques Chirac lors de la cohabitation. Mais en 1989, après la réélection de François Mitterrand, il a été réinstauré sous le nom d’Impôt de Solidarité sur la Fortune. Durant les présidences suivantes, il a été aménagé à plusieurs reprises, avant d’être supprimé par la Loi de Finances 2018 et d’être remplacé par l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI). Cette mesure, promesse de campagne d’Emmanuel Macron, avait un double objectif :

• Encourager les épargnants français à délaisser l’investissement immobilier pour investir dans les entreprises. Une démarche jugée plus productive pour l’économie française.

• Inciter les exilés fiscaux à revenir payer leurs impôts en France.

Qu’est-ce qui a changé avec l’IFI ?

Concrètement, l’IFI s’apparente fortement à l’ISF. En effet, le seuil de taxation est resté identique. Tous les foyers fiscaux possédant un patrimoine immobilier net supérieur à 1,3 million d’euros au 1er janvier de l’année d’imposition sont imposables à l’IFI. De même, l’Impôt sur la Fortune Immobilière reste soumis au barème progressif d’imposition et les contribuables dont la valeur du patrimoine est comprise entre 1,3 et 1,4 million d’euros continuent de bénéficier d’un système de décote permettant d’éviter l’effet de seuil. Enfin, comme pour l’ISF, un abattement de 30 % reste appliqué sur la valeur de la résidence principale.

La principale différence réside dans la base de taxation qui a été réduite. Contrairement à son prédécesseur, qui portait sur tous les éléments du patrimoine (à l’exception des œuvres d’art et biens professionnels), l’IFI ne s’intéresse qu’aux valeurs immobilières.

Ainsi, les biens imposables à l’IFI sont :

• Les maisons, appartements et leurs dépendances

• Les bâtiments classés monuments historiques

• Les immeubles en cours de construction

• Les immeubles non bâtis comme les terrains à bâtir, agricoles…

• Les immeubles ou fraction d’immeubles détenus indirectement via des titres et parts de sociétés : SCI, SCPI et OPCI

• L’ensemble des biens et droits immobiliers non-professionnels

À noter que les biens professionnels, les biens ruraux loués par bail à long terme, les bois et les forêts sont exonérés d’IFI.

Comment est calculé le montant de l’IFI ?

Si la date de déclaration de l’impôt de solidarité sur la fortune dépendait de la valeur du patrimoine, pour l’IFI, elle se fait quoiqu’il en soit en même temps que la déclaration de revenus. Cependant, comme pour l’ISF, c’est au contribuable d’estimer son patrimoine et de calculer l’impôt à payer. Pour ce faire, il faudra soustraire de la valeur du patrimoine imposable du foyer fiscal, les abattements généraux et spéciaux, ainsi que les dettes déductibles. Une fois obtenu l’assiette imposable nette, il faudra y appliquer le barème progressif suivant :

• Jusqu’à 800 000 euros : 0 %

• Entre 0,8 et 1,3 million d’euros : 0,50 %

• Entre 1,3 et 2,57 millions d’euros : 0,70 %

• Entre 2,57 et 5 millions d’euros : 1 %

• Entre 5 et 10 millions d’euros : 1,25 %

• Au-delà de 10 millions d’euros : 1,50 %

 

Les promesses ont-elles été tenues ?

Un an après l’instauration de l’IFI, ce nouvel impôt semblait tenir ses promesses. En 2019, selon Bercy, 139 149 foyers fiscaux avaient été assujettis à l’IFI, ce qui avait rapporté près de 2,1 milliards d’euros. Mieux que les 1,5 milliard espérés. À titre de comparaison, en 2017, 360 000 foyers fiscaux avaient dû s’acquitter de l’ISF pour un montant total de 4,2 milliards d’euros.

Cependant, un rapport publié le 8 octobre dernier par France Stratégie, le comité chargé d’évaluer l’impact du remplacement de l’ISF par l’IFI, dresse un bilan plus mitigé.

Il semblerait que ce soient les plus aisés qui en aient le plus profité. En effet, 0,1 % des foyers les plus riches aurait ainsi reçu deux tiers du total des dividendes distribués en 2018, contre une moitié seulement avant la réforme. « Le revenu moyen des 0,1 % des foyers fiscaux les plus aisés en 2018 est 27,5 % plus élevé que celui des 0,1 % les plus aisés de 2017 », résume le comité d’évaluation. De même, si le passage de l’ISF à l’IFI a permis de diminuer le nombre d’exilés fiscaux et d’en faire revenir certains dans l’Hexagone, les chiffres restent pour l’instant à relativiser. Ces derniers portent sur « de petits effectifs, de l’ordre de quelques centaines, à comparer avec les 130 000 contribuables assujettis à l’IFI en 2018 » précise le rapport.

Enfin, toujours selon le rapport de France Stratégie, il ne serait pas encore possible « d’estimer si la suppression de l’ISF a permis une réorientation de l’épargne des contribuables concernés vers le financement des entreprises ». Or, il s’agissait du principal objectif de cette réforme.

Selon Bercy, il serait trop tôt pour mesurer l’impact réel de la mise en place de l’IFI sur l’économie française, d’autant plus que la crise économique engendrée par la pandémie de Covid-19 aurait compliqué l’évaluation des effets de la réforme de l’ISF.

Pour accéder au rapport France Stratégie

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